Coup du soir en lac de montagne

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Résider au beau milieu d’un massif montagneux s’avère parfois assez réducteur en termes d’options disponibles (le type de coins de pêche prédominant pouvant se résumer sous l’appellation générique « rivières-rapides-moyennes »).

Toutefois, la proximité avec les cimes permet également de s’offrir quelques sorties plus originales, comme des coups du soir rapides en lac d’altitude.

La pêche en lac de montagne est avant tout une affaire de timing : être là au bon moment est prépondérant et permet de relativiser le légendaire côté capricieux inhérent à ces milieux. En effet, chaque plan d’eau possède une période faste durant une saison, qui se situe généralement quelques jours après la débâcle, lorsque la température de l’eau remonte (inflation qui permet aux poissons de sortir de leur léthargie) alors que les proies restent rares (ce qui les maintient peu discriminants et relativement faciles à leurrer). Pour le pratiquant désireux d’optimiser sa saison, cette réflexion préalable doit être permanente, tant elle conditionne le résultat d’une partie de pêche. Pour les autres, qu’ils soient peu intéressés par l’écologie des milieux qu’ils fréquentent ou préfèrent s’arc-bouter à décider les truites rétives du mois d’août, je ne peux rien pour eux !

Le lac convoité en cette soirée de juin est situé à 2200 m. A en juger par la relative précocité du dégel cette année, le moment devrait être favorable. En partant en fin d’après midi, il me reste un temps de pêche de 2h environ après une montée vite expédiée, voire 3h si des touches tardives justifient une descente à la frontale. Avant d’envisager un heureux dénouement, il va falloir trouver les poissons rapidement (souvent très localisés à cette période). De par l’impossibilité de navigation sur ces plans d’eau, la lecture d’eau se résume au repérage des divers éléments marquant du relief (anse, arrivée d’eau, secteur d’éboulis), ainsi que d’autres paramètres très impactant comme la direction du vent et la pente des berges. En début de saison, les salmonidés recherchent leur pitance sur les secteurs peu profonds qui se réchauffent en premier, là où les chaines trophiques redémarrent (surtout s’ils sont en marge des courants froids formés par les arrivées d’eau froides et le vent).

La montagne en juin, fleurie et paisible, avant que les hordes de juillettistes n’investissent les lieux :

Coup du soir en lac de montagneCoup du soir en lac de montagne

Une petite cheminée avec main courante, juste avant le final :

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A mon arrivée, le lac est déjà plongé dans l’obscurité et un vent de nord glacé souffle en rafales. C’est le déversoir qui reçoit les vagues :

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Quelques coups de ligne espacés dans cette zone de chasse n’apportent rien. Je remonte le lac par la berge de gauche, assez uniforme et pentue, en effectuant plusieurs lancers espacés par acquis de conscience, alors que la zone d’arrivée d’eau, peu profonde et bien pourvue en végétaux, me fait de l’œil.

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Ces premières minutes me rapportent quelques poissons disparates :

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En l’absence de captures en série, je ne m’attarde pas.
Au bout du lac, la profondeur diminue et la surface est lisse, je monte un poisson nageur coulant silencieux de petite taille (Phoxy Minnow HW) de façon à aborder discrètement la zone en commençant par des lancers très près du bord où les truites se postent aux extrémités de la journée, puis en les allongeant progressivement en éventail vers le large. Ça paye d’entrée :

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Les arrivées d’eau, postes classiques en lacs de montagne, ne sont véritablement porteuses que s’il existe un contraste thermique avec l’eau du lac. En début de saison par exemple, une arrivée d’eau glaciale dans un lac déjà froid ne vaut pas grand chose. Bien que ce soit le cas ici, c’est également la zone où le fond tombe le plus lentement. Je pars donc dans l’optique d’insister là, dans l’expectative d’individus croiseurs. Ils répondent présents :

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… jusqu’à qu’une touche lourde sur une pause, annonçant un individu de belle taille, peu fréquent à cette altitude :

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Après avoir dépassé la zone de l’arrivée d’eau, une fosse se dessine et mon Phoxy Minnow HW se fait intercepter par un petit omble chevalier alors qu’il nageait en milieu de colonne :

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Je le troque contre un Divinator S 2,5 pouces sur tête plombée Sakura Grogneuse 5 g, plus à même de  tenter d’éventuels congénères moins énervés, au niveau de leur position habituelle, c’est à dire près du fond. Ils clôturent ce coup du soir bien animé :

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Pour de nombreux adeptes des techniques modernes aux leurres, l’exploration des lacs d’altitude reste assez méconnue, exception faite de quelques rencontres fortuites au détour de villégiatures familiales, souvent synonymes de lacs faciles d’accès en pleine saison, dans des conditions qui ne permettent pas réellement de palper tout le potentiel halieutique de ces milieux. Ceux qui souhaitent se lancer doivent porter une attention toute particulière au matériel de randonnée et apprendre les rudiments de l’évolution en haute montagne. Pour faciliter vos choix, il est judicieux de consulter préalablement quelques sites/forums spécialisés du net ou, si vous êtes préférez le format papier, de rechercher quelques bouquins sur le sujet, dont le très bon « Guide randos-pêche en lacs de montagne », même si là, je manque un peu d’objectivité dans mon conseil !

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A bientôt,
Simon SCODAVOLPE